Rav Oury Cherki

Vayikra - L'ordre des sacrifices



L'ordre des sacrifices dans la section hebdomadaire de Vayikra est: holocauste, oblation, rémunératoire, expiatoire et délictif, alors que dans la paracha de Tsav que nous lirons la semaine prochaine, l'ordre varie légèrement: holocauste, oblation, expiatoire, délictif, et rémunératoire. Le sacrifice rémunératoire passe du milieu à la fin de la liste. Il ne fait aucun doute que les sacrifices sont rapportés selon un ordre décroissant d’importance aux yeux de l'Eternel. L'holocauste et l'oblation expriment un rapprochement de l'homme vers Dieu d'un élan du cœur non entaché d'un quelconque intérêt personnel, de satisfaction personnelle. C'est un service idéal correspondant à la vocation même du sacrifice - un don de soi entraîné par l'amour: "Si quelqu’un veut présenter de parmi vous, une offrande au Seigneur" (Lev. 1, 2). La volonté profonde est de s'offrir soi-même en sacrifice. Seulement, comme lors du ligotage d'Isaac où Dieu a ordonné à Abraham: "Ne porte pas la main" (Gen. 22, 12), car l'Eternel désire la vie, de même en est-il pour la descendance d'Isaac. Dieu ne désire que l'intention de se sacrifier, et non le sacrifice matériel, du corps, qui peut, lui, être remplacé par un "bélier" (id. 13): "c’est dans le gros ou le menu bétail que vous pourrez choisir votre offrande" (Lev. 1, 2).


La particularité du sacrifice rémunératoire

Le sacrifice rémunératoire est un processus plus complexe: l'homme est assis à la table de l'Eternel. L’autel mange, de même que le propriétaire. Un tel statut exige de l'homme qu'il élève sa consommation alimentaire à un niveau de sainteté digne de l’autel. Ce service appartient au peuple d'Israël, capable de diriger son plaisir matériel vers l'Eternel, et non au reste de l'humanité, duquel seuls les holocaustes sont apportés, qui n'a pas encore acquis la capacité de joindre le plaisir personnel au service divin.

Les sacrifices expiatoire et délictif sont la conséquence de la faute de l'homme et du besoin de réparer. Leur existence n’étant qu’a posteriori, leur place est logiquement à la fin de l’énumération.


Enseignement de Moise et d'Aharon

Cependant, cet ordre n'a de sens que lorsque le sacrifice est apporté par élan du cœur, lorsque l'homme agit par idéal. Comme le dit Rachi: "[la Thora] parle de sacrifices volontaires" (sur Lev. 1, 2). Cet ordre appartient à la section de Vayikra, dans la lignée de "l'enseignement de Moise", ouvrant par "[Dieu] appela Moise" (id. 1, 1), décrivant le service de l'homme idéal, poussé par son intellect, pour qui la faute est une notion lointaine. A l'inverse, la section de Tsav est la continuation de Tetsavé (comme l'écrit le rav David Tsvi Hoffman, que ces sections ont été dites ensemble mais n'ont été séparées qu’afin que la partie sur le sanctuaire soit écrite dans le livre de l'Exode et celle sur les sacrifices dans celui du Lévitique), présentant le coté obligatoire du sacrifice là où l’homme a tendance à vouloir s’en échapper: "Le texte incite à d’autant plus de zèle qu’il y a risque de perte d’argent" (Rachi sur Lev. 6, 1). C’est "l’enseignement d’Aharon", rapprochant ceux qui risquent de fauter. C’est pourquoi la Thora fait précéder les sacrifices expiatoire et délictif au rémunératoire, car dans la situation où l’homme n’a pas encore réparé sa faute, il y a le risque que son intention, lorsqu’il apporte un sacrifice rémunératoire, ne soit pas encore totalement orientée vers l’Eternel.